MEAT CITY : POUR VOIR ÇA PAR MOI-MÊME

On ne sait pas vu depuis un brin, l’ami. Je suis pas pour autant disparu. Je travaille fort le viarge pour payer mon appart de bourge du Plateau qui coûte trop cher mais qui assure un confort relatif à mes amours. Ça me demande beaucoup d’énergie, de temps. Là, j’ai le goût, avant de partir au très lointain là-bas en Chine, de prendre un peu de temps pour te jaser ça. Je n’ai aucune autre excuse, je suis pas le plus présent des chums, mais je te demande de me lire le temps d’une clope ou deux pis d’une bonne bière qui mousse. Le prochain coup, on se prend dans nos bras.

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L’hiver a été long pis frette comme on les aime, comme on les aime quand on sait jouer un peu au hockey sans mourir dans le coin de la bande, quand on sait trouver le temps nécessaire d’aller glisser sur les pentes douces de Rosemont avec sa fille, quand on sait se munir de bonnes bottes brunes pour marcher à chaque jour minimum 6 kilomètres dans la gadoue pour se rendre au boulot brasser de la braise d’avenir. L’hiver a été l’hiver. Je m’en reviendrai betôt avec le printemps dans les dents pour te rire ça un bon coup.

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Pourquoi la Chine ?

C’est un de ces hasards dont on est témoin sans comprendre. Quand j’ai rencontré mon pote Josh aux États-Unis lors d’un festival de traduction poétique (Lewiston, Maine), ce dernier m’a invité à son université (Nanshida, Nanjing), en 2012. Tu te souviens, ça parlait révolution pis carrés rouges, ça espérait fort dans ce temps-là. Pendant que tu manifestais dans les rues de Montréal avec tes casseroles entre deux shooters, moi, j’errais dans les ruelles d’une autre civilisation en train de lire Mao. (Pas top, en passant, le livre Rouge) Ta révolution, qui n’est malheureusement pas advenue, je l’ai vue mourir de loin. Là-bas, j’ai rencontré un tas de poètes nankinois bourrés de talent qui ne demandaient qu’à être connus. Avec l’aide de Josh, je les ai traduits dans une revue. On m’a demandé par la suite de traduire des poètes québécois pour qu’ils soient traduits en mandarin. (Le Québec, en Chine, c’est tellement underground !) Je m’y suis attelé. Pendant trois ans, presque, je m’y suis attelé. Il s’est passé plein d’affaires depuis ce temps-là. Les réseaux sociaux n’ont pas empêché la victoire des libéraux au Québec, les réseaux sociaux n’ont pas empêché rien du crisse d’autre que de nous réconforter dans nos égos flamboyants. Ça explique un peu pourquoi tu me retrouves plus sur Facebook autrement que dans une Page professionnelle, impersonnelle, dépourvue de sueur, de sang ou de sperme.

Depuis plus de quatre ans, je travaille à l’écriture d’un roman. Un roman sur les itinérants de Montréal qui devrait, si les astres s’enlignent ben, sortir à l’automne. Je peux rien te promettre. J’aurais peut-être même pas dû t’en parler. Mais bon, faut que ça sorte. Tout pour dire, depuis un sacré bon bout de temps je pioche sur le même livre. Là, partant dans le lointain là-bas, je sens que l’occasion est parfaite pour enfin passer à autre chose, voire revenir à la poésie un peu. Je me suis toujours senti un peu imposteur quand venait le temps de parler de poésie, d’engagement pis toute. C’est sûrement de ma faute, parce que j’ai construit bien malgré moi cet ethos de poète engagé qui me colle au cul pis qui me fait chier. Qui me fait chier parce qu’il me semble que c’est trop réducteur. Colère, amour, courage, espoir, vigilance, compassion. Ce sont les seuls termes qui pourraient bien traduire mon engagement. Je n’ai pas la fibre de l’intellectuel parvenant à établir les bases d’une école de pensée. Je veux pas qu’on me colle à une bande. Je suis un carcajou solitaire, un rorqual qui voyage, une ivraie qui va. Et je suis un élève médiocre. Je ne me suis jamais élevé au-dessus de la masse. Je n’ai rien de particulier. Ce qui me distingue, par contre, c’est probablement mon obstination, ma volonté, je dirais, surtout, ma détermination agressive à casser du superficiel. Mais bon, je m’éloigne, je m’éloigne avant même d’être parti. Je suis déjà ailleurs. J’ai pus envie pantoute d’être icitte.

Quitter le Québec en disant que le pays est trop con aurait peut-être fait des vagues il y a quelques années. Mais aujourd’hui, s’exiler au loin le plus longtemps et le plus souvent possible fait partie d’une culture ordinaire. Quand tu as le goût de vomir, mon chum, qu’est-ce que tu fais ? Comme moi, tu vas le faire un peu plus loin, question que ça tombe pas sur ceux que tu aimes.

L’humanité du futur

Je pars pas en République populaire de Chine comme un gros touriste sale, je pars pas en Chine comme un conquérant prof d’anglais, je pars pas en Chine comme quelqu’un qui s’en crisse de la Chine pis qui veut juste ramener des photos. Tu connais bien ma sensibilité exacerbée pour l’Asie. J’ai voyagé déjà de nombreuses fois en Extrême-Orient, toujours comme un ti-cul déparaillé prêt à s’en prendre plein la gueule. Apprendre sur le terrain. Est-ce que je parle mandarin. Non. Est-ce que je vais l’apprendre du mieux que je le peux. Oui. Je me donne une vie pour y parvenir. Tout comme pour le coréen, tout comme pour l’anglais, l’espagnol, etc. C’est dans ce beat-là que je pars. Je veux apprendre. Je veux écrire. Je veux me retrouver, parce qu’icitte il n’y a plus grand chose de bon qui m’inspire. Je me sens étouffé entre les discours de droite comme de gauche, je me sens amoindri dans la reconnaissance de mes valeurs existentialistes, j’ai l’impression d’être un étranger chez nous. Je sais pus d’où j’suis. Je capote ben raide. J’sais ben. Tu vois, du coup, à quel point ce voyage va me faire du bien.

J’ai beaucoup de respect pour les Chinois, ou devrais-je dire, pour l’ensemble des nations qui composent la fédération chinoise. Là-bas, je vais m’y perdre, m’y confondre, m’y fondre. Je vais cesser d’être qui je ne suis pas pour n’être plus personne, et cela va être assurément et foutrement inspirant. Oui.

Je ne pense pas que la solution se trouve nécessairement dans l’exil, mais quand même. Force est d’y penser, surtout en ces années 2015… La plupart de mon entourage pense à crisser le camp du Québec parce qu’il n’y a aucun projet qui vaille, aucune illusion, aucun rêve, aucun projet. Bientôt, le Québec ne sera qu’une terre aride jonchée de vieillards fédérastes malheureux.

L’ouverture sur le monde ne se résume pas à aller bouffer comme un porc dans un resto exotique de la rue Prince-Arthur, s’ouvrir au monde c’est aller vers le monde, c’est faire les premiers pas, c’est risquer le tout pour le tout. Payer de sa poche. Saigner s’il le faut. Parce que l’humanité, ça n’a pas de prix (scusez le slogan poche). Mais bon, c’est ce que je pense, et avec sincérité, dans le plus tréfonds de mon coeur.

On se tient au courant, mon chum, pour l’instant, j’ai encore à faire icitte un peu avant d’aller prendre l’avion dimanche. Je te reviens avec des nouvelles, des poèmes, des clichés pis, si Bouddha le veut, de l’espoir pour la suite du monde.

xxx

DANNY PLOURDE

XXX

John Lennon, Meat City

Well, well, I been to Meat City to see for myself
Well, I been to Meat City to see for myself
Been to Meat City, been to Meat
Just got to give me some rock ‘n’ roll

People were dancing like there’s no tomorrow
Meat City
Finger lickin’ chicken pickin’, Meat City shook down U.S.A.
Pig Meat City

Well, I been the mountain to see for myself
Well, I been the mountain to see for myself
Been the mountain, been the
Just got to give me some rock ‘n’ roll

Snake doctors shakin’ like there’s no tomorrow
Freak City
Chicken suckin’, mother truckin’, Meat City shook down U.S.A.
Pig Meat City

Well, I’m going to China to see for myself
Well, I’m going to China to see for myself
Going to China, going to
Just got to give me some rock ‘n’ roll

People were jumping like there’s no tomorrow
Meat City
Finger lickin’ chicken pickin’, Meat City shook down U.S.A.
Pig Meat City

Well, I’m going to China
Yes I’m going to China
Well, I’m going to China
Yes I’m going to China

I’m going to China
Yes I’m going to China
Alright



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